Mais ne pas oublier nous impose aussi collectivement ce devoir de ne plus recommencer ce drame humain qu’a été l’esclavage.
En ce 20 décembre 2020, nous voilà à nouveau plongés dans la mémoire de cette longue et douloureuse histoire qui fait rappel à l’esclavage.
20 décembre 1848, plus de 62 000 esclaves retrouvent leur liberté à La Réunion.
Liberté si chère à arracher, liberté « qui a franchi parfois de grands obstacles ».
L’histoire des Réunionnais est jalonnée d’heurs, de malheurs, d’héroïsmes, de courage qui ont jalonné au fil des siècles cette identité singulière, mais si riche de rencontres, riche de son Vivre Ensemble.
Ce 20 décembre, nous aurons une pensée pour tous ceux qui ont été victimes de ce système politique coloniale ignoble, injuste et brutal.
La Fêtkaf est la fête de tous les Réunionnais, la fête de la mémoire de l’esclavage et de l’engagisme.
L’occasion à nouveau de saluer ces luttes menées pour l’obtention de cette émancipation qui a puisé dans ce passé avec ses contradictions, sa richesse, ces multiples héritages et cette force pour mieux regarder demain.
Un héritage qui retrace l’histoire de ces esclaves rebelles qui n’ont jamais cessé de vouloir devenir libres.
En prenant la fuite «alé maron», ils ont résisté à leur servitude.
Réfugiés dans les montagnes, ils ont construit une culture, une spiritualité, des mouvements politiques dans un geste de résilience. Ils ont affirmé l’humanité qu'on leur niait.
Ces héros ont su secouer et briser les chaînes odieuses de l’esclavage.
Leur combat rejoint d’ailleurs ceux des philanthropes et des intellectuels qui se se sont aussi battus contre la traite et l'esclavage au nom de l'humanité.
Cette histoire a renforcé les combats et les valeurs de la république.
Et toute cette histoire est notre histoire. Elle nous relie à l’Afrique, aux Caraïbes, à l’Amérique, à l’Europe et à l’Océan Indien.
Comment continuer alors à transmettre cette mémoire de l’esclavage dans une « justice mémorielle» à l’heure où aujourd’hui, notre société affiche le portrait d’une France fragmentée composée d’îles et d’îlots qui ne cessent de s’éloigner les uns des autres.
Ce Vivre Ensemble et l’expression de cette laïcité républicaine sont de plus en plus piétinés par ces courants identitaires communautaristes, ces groupes qui partagent en commun un certain nombre de caractéristiques et qui entretiennent des relations, mais vivent séparés des autres.
En ce 20 décembre qui ravive ces moments difficiles et douloureux, la transmission de notre mémoire peut se transmettre sous plusieurs formes, mais elle doit surtout nous rassembler pour nous rappeler qui nous sommes et quelle mémoire voulons-nous laisser dans nos livres, dans les rues, dans nos quartiers.
Hier tout avait été fait pour effacer les souffrances et les résistances des esclaves.
Nous avons aujourd’hui conscience de ce que l’esclavage, la traite et leurs héritages représentent dans l’histoire de notre pays, dans notre culture, dans notre âme.
Cette histoire nous devons tous l’assumer ensemble. On ne doit plus et pas construire dans la dissimulation, dans l’oubli et ni dans le déni et l’instrumentalisation.
Le travail doit continuer pour assumer tous ensemble dans la paix des mémoires cette histoire et assurer la réparation morale, historique, éducative et sociale de l’esclavage.
Cette quadruple réparation passe par le renforcement de notre cohésion sociale et l’interculturalité des Réunionnais d’origines diverses qui partagent notre héritage et nos richesses communes.
Cette réparation, c’est cultiver et valoriser sans cesse la diversité et l’unité, les différences et le convergences.
Que cette FETKAF nous rassemble et se doit être cette source d’espoir éternellement ravivée.
Qu’elle nous éclaire sur ce chemin d’espérance et d’humanité dans le respect des différences pour tracer confraternellement l’avenir et relever ensemble les nombreux défis de demain.
Nous sommes les héritiers du passé et les enfants du présent.
Aline Murin