sak ifé nout jordu ék nout demin

"Phénomène inquiétant, des groupes extérieurs prennent le contrôle de secteurs économiques de l'île"


Invité(e)
Mercredi 16 Janvier 2013

"Le sénateur Paul Vergès est arrivé à Paris dimanche soir. Lundi matin, il a rencontré le ministre des outres-mer, pour un tour d’horizon des problèmes économiques, sociaux et politiques de La Réunion, dans leur urgence et dans leur perspective".


"Paul Vergès a notamment évoqué l’importante question de l’évolution de la situation à La Réunion, comme dans son environnement géoéconomique, non seulement par rapport aux îles voisines de l’Océan Indien, mais aussi par rapport aux pays de l’Afrique australe et orientale et, au  delà, de l’Océan indien : Inde, Indonésie, Chine.

Tous ces pays sont beaucoup plus proches de La Réunion, géographiquement, que n’est l’Europe.

Paul Vergès a souligné l’aggravation de la crise structurelle de La Réunion,  crise aggravée par les conséquences de la crise économique mondiale, ouverte il y a près de 5 ans

Sur les deux plans - crise structurelle à La Réunion et crise mondiale -, personne ne peut se risquer à prévoir une fin prochaine.

Il en découle donc que les problèmes de La Réunion doivent être envisagés non seulement au travers de leurs conséquences immédiates, mais aussi à un horizon plus lointain.

Les problèmes à traiter doivent donc être pris tant dans l’urgence que dans les moyen et long termes.

La situation actuelle, par le simple examen de la presse locale ou des publications d’organismes publics comme l’INSEE, révèle la gravité et l’accélération du processus de la crise.

Sur le plan économique, de grandes entreprises  font l’objet de procédures devant le tribunal de commerce : le dernier exemple est celle   de Monsieur Le Bourvellec.

Phénomène inquiétant, des groupes extérieurs à La Réunion prennent le contrôle de secteurs économiques dont le capital a été durant des décennies, sinon des siècles, accumulé à La Réunion (économie sucrière, secteur de l’automobile, secteur de la distribution….)

Sur le plan du commerce, le Président de la Chambre de Commerce et d’Industrie  souligne la gravité de la situation des petites et très petites entreprises. 10.000 lettres ont été adressées à leurs chefs d’entreprises, afin qu’ils règlent rapidement leurs contributions sociales. Or, la majorité de ces entreprises ont fait savoir qu’elles ne pourraient pas honorer leurs dettes.

Sur le plan du tourisme, les professionnels indiquent que 2012 a été une année médiocre, en dessous des résultats enregistrés en 2011.  Quant à l’année 2013, elle sera « catastrophique ».

A cette conjoncture économique dégradée, s’ajoutent les conséquences des aléas climatiques, la sécheresse pour les agriculteurs et dans l’immédiat, les conséquences du cyclone Dumile,  notamment pour les maraîchers et l’activité fruitière.

Ces exemples traduits dans les chiffres, sont probants et ne dévoilent que quelques aspects de la situation économique et font référence à une actualité immédiate. 

La situation, à moyen terme, ne s’améliorera pas. Par exemple, il faudra plusieurs mois pour que l’agriculture puisse se redresser des conséquences de la sécheresse et des dégâts provoqués par le cyclone.

Ainsi, alors que les discussions sont engagées pour les produits concernés par le bouclier qualité prix en application de la loi contre la vie chère, la population réunionnaise  est confrontée à l’augmentation des prix des produits agricoles suite au cyclone, comme à celle des prix d’autres biens de  consommation courante : électricité, transports, redevance de télévision etc.

D’autres signaux d’alerte sont également visibles : les conséquences du budget de la Nation pour 2013, avec les restrictions apportées aux dépenses publiques.

Les conséquences se font déjà sentir à La Réunion, où les collectivités locales (communes, conseil général, conseil régional) attirent l’attention des autorités sur les difficultés pour tenir leur budget.

Dans  ce contexte déjà difficile, 2013 va connaître d’importants rendez-vous : en effet, cette année est celle de la réforme de l’octroi de mer.  Quelles solutions va-t-on proposer à l’Union européenne ?

Par ailleurs, le budget européen est lui aussi mis sous le signe de la rigueur.  Le montant et la mobilisation des fonds structurels, pour les 7 années à venir, sont soumis à de fortes contraintes.

2013, c’est aussi, après l’accord intérimaire, la conclusion probable des APE (Accords de Partenariat Economique) entre l’Union Européenne d’une part, et les anciens pays ACP (Afrique Caraïbes Pacifique) d’autre part.  

Ces accords s’inscrivent dans la voie de l’intégration économique suivie par toutes les îles autour de La Réunion, ainsi que l’Afrique du sud et les pays de l’Afrique orientale

Au delà de 2013, la situation de l’Union européenne et de la zone euro en particulier s’annonce difficile.

La crise continuera à toucher les pays développés : l’Europe, les Etats unis, ou le Japon. Mais dans le même temps, les pays émergents d’Amérique du Sud (dont le Brésil), d’Afrique, (dont l’Afrique du Sud) mais aussi tous les pays d’Asie (la Chine, l’Inde, l’Indonésie, et tout le Sud Est asiatique), annoncent des prévisions de croissance nettement en progrès.

C’est dans ce contexte en rapide évolution que nous devons nous projeter : qu’est-ce qu’attend La Réunion, dans une situation où les conséquences de sa crise structurelle seront aggravées  par les données objectives de la situation économique et sociale ?

Durant les 5 ans du mandat présidentiel, entre 2012/2017, La Réunion comptera 50.000 habitants de plus. Dans tous les secteurs, les problèmes seront amplifiés.  Et durant  cette période,  La Réunion aura 10.000 bacheliers de plus chaque année, soit 50.000 nouveaux bacheliers à la fin mandat présidentiel. Or, le chômage frappe déjà 60% des jeunes en âge de travailler.

La Réunion compte plus de 160.000 demandeurs d’emplois aujourd’hui. Mais combien dans 5 ans ?

25.000 demandes de logements sont en souffrance. Or, le rythme actuel de constructions de logements sociaux représente moins de la moitié du nombre de logements qu’il faudrait construire chaque année.

50% de la population réunionnaise vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté. Mais quel sera le niveau dans les 5 ans à venir ?

30% de la population réunionnais est allocataire des minimas sociaux cette année. Combien seront-ils dans 5 ans ?

Dès maintenant, il est impératif de résoudre les problèmes urgents comme le sort du RSTA qui prend fin en mai 2013. Et celui de la prime COSPAR, prolongée pour un an seulement.

Mais qu’adviendra-t-il après ?

Face à cet amoncellement de problèmes d’urgence, ceux posés à moyen terme, et ceux posés à long terme, la classe politique de La Réunion est placée face à ses responsabilités.

Que préconisent les élus, outre telle ou telle mesure de proximité (emplois avenir, emplois aidés, contrats de génération etc.) mesures certes positives, pour faire face à la situation et à son évolution prévisible?

Quel est le plan urgence économique et social, s’inscrivant dans un avenir durable pour La Réunion, qui vit un changement aussi important que celui de 1945, à la veille de la loi du 19 mars 1946 ?

Voilà l’urgence ! Voilà la responsabilité de l’ensemble des partenaires : élus, responsables économiques et sociaux de La Réunion, et gouvernement !

Pour que des solutions  efficaces soient trouvées pour les problèmes d’urgence et ceux de moyen et long terme, il convient de les appréhender dans la cohérence et dans la perspective d’avenir.

Les principaux intéressés doivent parler, prendre leurs responsabilités et proposer des solutions dans tous ces domaines, pour l’immédiat et pour l’avenir.

Ainsi, aussi bien pour des questions urgentes comme l’avenir du RSTA que  le sort de la Route du littoral, et de manière générale, pour  toute la question des transports et des déplacements , pour l’adaptation de la société réunionnais face aux dégâts provoqués par les cyclones (comme la protection des radiers contre leur submersion, la mise en sécurité des infrastructures, les problèmes d’alimentation en eau potable, le traitement des eaux polluées),  pour le problème décisif et stratégique de l’énergie où notre île ne manque pas d’atouts,  pour le soutien à l’activité économique, pour la question du logement, il convient d’apporter des solutions rapides mais cohérentes et pérennes.

Le moment de vérité a sonné : comment mettre fin à l’apartheid social de La Réunion, aux inégalités de revenus qui s’aggravent et s’élargissent ? Comment relancer l’activité économique et remettre La Réunion sur la voie du développement durable ?

Le ministre des Outre-mers a écouté longuement cette analyse, il est également  intervenu longuement sur tous ces aspects.

L’avenir dira ce qu’il en sortira.

Le sénateur Paul Vergès a parlé au nom de l’intérêt général, au nom des Réunionnaises et des Réunionnais, et en particulier de celles et ceux qui ont voté pour le candidat François Hollande,  sur la base des engagements pris.

Le Parti Communiste Réunionnais est membre de la majorité présidentielle, victorieuse, le 6 mai 2012 ; c’est un contrat de 5 ans - et peut être de 10 ans – qu’ils ont signé.  

Les Réunionnaises et les Réunionnais  en attendent les conséquences positives, sans impatience, mais d’une façon concrète. Ils attendent un signe ; ils n’attendent pas  tout, tout de suite, mais attendent que cela commence dès maintenant.

Le ministre a écouté l’analyse et les propositions faites ; il a donné sa vision de la situation.

Désormais, l’avenir dira si le Parti Communiste Réunionnais a fait le bon choix, le 6 mai 2012. Ce qu’il continue à croire jusqu’à maintenant".

Sénateur de La Réunion


Dans la même rubrique :