sak ifé nout jordu ék nout demin

Le cheminement vers la lumière


Communiqué
Mardi 26 Avril 2011

Discours de Mgr Gilbert Aubry lors de l’inauguration de la mise en lumière de la cathédrale, Saint-Denis le 26 avril 2011 en présence de Frédéric Mitterand, ministre de la Culture


Monsieur le Ministre,

L’Eglise catholique à La Réunion, à travers ma personne et celle du Père Arnaud Blunat, curé de la paroisse, a l’honneur de vous saluer et de vous souhaiter un séjour agréable dans notre île et fructueux pour nous tous. Spontanément, j’allais vous dire « bienvenue Monsieur le Ministre ».

Vous êtes le bienvenu... mais vous êtes ici chez vous, sur cette place, sur cet espace public, face à un édifice qui appartient à l’Etat et qui est un monument classé. Merci donc de cette inauguration de la mise en lumière de la cathédrale.

Monsieur le Ministre, Monsieur le Préfet, Monsieur le Maire, Mesdames, Messieurs,
Monsieur le conservateur de la cathédrale vient de nous relater l’histoire de l’édifice. Permettez-moi maintenant d’évoquer cinq événements qui, à partir de ce lieu, ont marqué l’histoire de la communauté catholique dans l’histoire de La Réunion pour le cheminement de notre part d’humanité collective vers la lumière.

−    1812. Les Anglais occupent La Réunion depuis 1810. Le 7 mars, le gouverneur britannique Farquhar réquisitionne comme tribunal la petite église qui était à la place de la cathédrale. Il s’agit de juger, de condamner... et de condamner à mort des esclaves suite à la révolte de Saint-Leu en 1811. Au moment du jugement, la foudre traverse l’église de part en part. Comme pour une désapprobation divine du lieu à de pareilles fins ?

−    1847, 18 septembre. Alexandre Monnet « le Père des Noirs », abolitionniste, rentre de Paris et arrive en rade de Saint-Denis. Sur cette place, se déroule une émeute dans laquelle des esclaves prennent sa défense. Il est expulsé de la colonie le 28 septembre à 9 heures du soir.

−    1848, 20 décembre. Proclamation de l’abolition de l’esclavage. Un Te Deum, chant d’action de grâce, est organisé dans l’église remplie de nouveaux affranchis. Ils sont chez eux. Il n’y a pas de blancs... sauf les officiels.

−    1919, Avril. L’épidémie de grippe espagnole fait rage. Le Père Thoué, curé de la cathédrale, mourra de cette peste le 11 mai après avoir mobilisé la communauté catholique et les bonnes volontés dans un élan de solidarité générale face au fléau.

−    1989, 1er mai. Le pape Jean-Paul II est ovationné dans cette cathédrale qui connaît son heure de gloire. Le 2 mai, devant une foule de 120 000 personnes, à la Trinité, il dit en créole « Rest pa dan’ fénoir, viens dans la lumière. (...) Soleil y lève, soleil y dort, la lune y lève, la lune y dort ; zot même la lumière y éteinde pas ». Jean-Paul II le dit aux catholiques et à travers eux, à toute La Réunion : amour, dignité humaine, liberté, responsabilité, ouverture aux autres, ici et dans l’Océan Indien.

Monsieur le Ministre, la mise en lumière de la cathédrale me fait lire en raccourci l’histoire du peuple de cette île qui s’est arraché aux turpitudes du passé pour inventer son vivreensemble. Ce vivre ensemble n’est pas idyllique mais l’Hexagone et bien des pays pourraient nous l’envier. La route de l’avenir passe par encore plus d’humanité. Le moment que nous vivons nous rappelle à tous qu’en accueillant intérieurement la Lumière sans origine et sans fin, chaque être humain peut devenir une pierre vivante du grand temple de l’Esprit (cf. Apôtre saint Pierre).

Et l’Esprit n’a pas de frontières. Il brise les frontières. Il met ensemble l’Est et l’Ouest, le Nord et le Sud pour que l’Humanité soit vraiment l’Humanité. A travers nos luttes et nos combats, pour qu’advienne un jour une plénitude d’amour. C’est l’horizon au-delà de tous les horizons et c’est déjà dans notre chair pour La Réunion et pour le monde entier.

Monseigneur Gilbert Aubry


Patrick Bonin


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