Jeanne LEPINAY, mariée depuis le 18 Mai 1777 à Pierre LEBON, a eu une conduite déplorable ; le ménage a connu des secousses terribles et il convient notamment de citer cette rocambolesque histoire jugée le 11 Janvier 1716 par le Conseil Provincial, juridiction établie à Saint-Paul depuis 1711 :
« Jacques VEL, esclave de Jean FONTAINE, était accusé d’avoir enlevé la nommée Jeanne LEPINAY, femme de Pierre LEBON dit « la Joie » du consentement de ladite Jeanne LEPINAY, et de l’avoir conduite de Saint-Paul à Saint-Denis, et Jeanne LEPINAY, dans les deux interrogatoires qu’elle a subis, avait déclaré que Jacques VEL avait eu commerce charnelle avec elle, ce que le malheureux niait avec énergie.
Ne pouvant confronter un blanc avec un noir esclave, et, par conséquent, ne pouvant sçavoir la vérité du fait exposé, le Conseil de Justice condamna Jeanne LEPINAY à faire amende honorable à la porte de l’église, pieds et teste nüe, en chemise blanche par-dessus la cotte, un cierge ardent à la main, et demander à genoux, publiquement et à haute voix, pardon à Dieu, au Roy et à la Justice du scandale qu’elle a porté au publique, de s’estre fait enlever de sa propre volonté, par Jacques VEL, esclave de Jean FONTAINE et, de là, estre conduite à la place publique pour estre mise sur le cheval de bois et y demeurer une heure exposé.
Et ledit Jacques VEL, esclave de Jean FONTAINE, à avoir les cinq doigts du pied gauche coupés par les mains de l’exécuteur des hautes œuvres en place publique.
Le même jour, 11 Janvier 1716, Pierre LEBON de son côté, convaincu d’avoir recelé de la tortue de terre, que son esclave Anselme dit Landouille luy avait apporté et d’avoir trafiqué avec les noirs de la Compagnie, de la viande et des panes de tortue de terre, se voyait condamné à cent livres d’amende, confiscation de l’huille, c’est-à-dire des douze flacons pleine d’huille de tortue de terre qui avaient été saisis chez lui, et estre présent lorsque l’on fera le châtiment de son esclave, teste nue.
Anselme reçut cent coups de fouet et la fleur de lis sur l’épaule droite. Cinq esclaves de la Compagnie, ses complices, reçurent chacun cent coups de fouets. »
Pierre LEBON est mort à Saint-Paul, écrasé par la chute d’un arbre, le 1er Décembre 1726 et moins de deux mois plus tard sa veuve se remariait (20 Janvier 1727).