sak ifé nout jordu ék nout demin

L’Ile de La Réunion, dernier escale pour les rescapés du colonialisme ?


Citoyen
Jeudi 12 Décembre 2013

En Avril 2003, un certain député de la droite coloniale, monsieur Thien Ah Koon voulait changer le nom de la Plaine des Cafres en Plaine des Volcans car selon lui cette dénomination historique faisait fuir les touristes, allant jusqu’à prétendre que le terme « Cafre » n’était pas très attirant.


Aujourdh’ui un procureur de la République, responsable ici de l’organisation du grand Raid, en l’occurrence monsieur Rober Chicaud, égrène les mêmes arguments concernant la statue dédiée aux enfants exilés de force en France métropolitaine car « il est mal venu » selon lui de  confronter directement les touristes à cette histoire brûlante de la France et de la Réunion qui feraient fuir les « fous » du grand raid, pas tous quand même, comme les requins chassent les surfeurs de la grande vague.
 
Tous ces gens rêvent d’une gloire sans fin sur une île paradisiaque dont ils seraient les inlassables promoteurs, et pour justifier leurs théories, ils manient constamment l’amnésie, les règles de salubrité publique pour éradiquer les familles pauvres sur « leur » territoire, la dissémination des requins pour « nettoyer » la mer et enfin la dévalorisation perpétuelle de l‘histoire et de la culture réunionnaise au nom des bienfaits  de la République française.
 
Cette arrogance doit cesser, et il nous revient de prendre en charge les rênes de notre destin personnel et sociétal par une réelle appropriation de notre histoire, par une volonté affirmée de mettre un terme à cet « esclavage mental » qui perpétue la domination de la  maîtr-ô-pôle, quelque soit la forme qu’elle prenne aujourd’hui.
Il nous revient également de faire l ‘analyse de cette posture coloniale qui transforme notre île en vitrine de la France métroplitaine et de tous ses représentants qui viennent faire leur marché dans cet espace « idyllique » et prônent à tous vents un exotisme insupportable.
 
C’est à nous de nous pencher sur ces pages douloureuses de notre histoire et d’interroger sans honte et sans esprit de revanche cette idéologie raciste sur laquelle s’est fondée l’esclavage et la traite négrière, socle de notre pays, l’engagement sans retour des centaines de milliers de travailleurs venus d’Afrique, de l’Inde, de l’Asie et de Madagascar pour servir ce pays, questionner ces lois scélérates de Michel Debré qui a privé ce pays de ces plus illustres intellectuels, se demander quelle était la fonction de cet exil forcé qu’a connu ces milliers  d’enfants arrachés de leurs familles pauvres pour repeupler des régions pauvres et désertes de la France métropolitaine, s’interroger encore sur cette mobilité arborée toujours et encore  comme une voie de salut pour tous ces jeunes réunionnais qui quittent leur pays sans espoir de retour, encore un  exil qui ne dit pas son nom !
 
Il faut se questionner et faire le bilan de cette politique d’abnégation qui érige « la métropole » en terme de référence absolue des réunionnais, y compris pour les saisons, ne parle-t-on pas ici du « printemps » des poètes ? Il faut savoir dire assez à ce mépris de notre histoire, à ce déni de notre souffrance, à cette dévalorisation constante de nos principes fondateurs et construire les bases de notre avenir réunionnais. Et pour cela il faut savoir dire à Monsieur Chicaud, Taisez-vous ! vous n‘avez pas la parole, car  précisément vous ne savez pas de quoi vous parlez !
                                                     

Ghislaine MITHRA-BESSIERE,  
Réunionnaise et Fière de l’être
 



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